Dugas ne le sait pas, mais il vient de terminer à 25 ans sa seule saison complète dans les majeures. Le 12 décembre 1932, il passe des Pirates aux Phillies dans un échange de plusieurs joueurs impliquant aussi les Giants de New York.
Dès l’échange complété, il devient à nouveau évident que Dugas aura besoin d’être excellent pour obtenir un poste régulier au champ avec les Phillies qui sont très bien pourvus à ce niveau avec Hal Lee dans la gauche (moyenne de .303, 18 circuits et 85 points produits en 1932), Chick Fullis (obtenu des Giants lors de l’échange du 12 décembre) au centre (.298 en 1932) et surtout au poste préféré de Dugas dans la droite : Chuck Klein un autre futur membre du Temple de la Renommée (.348, 38 C et 137 PP en 1932). Dugas, pour sa part, espère obtenir le poste de champ centre. Cependant le premier but régulier de l’équipe Don Hurst qui a frappé pour .339 avec 143 points produits la saison précédente quitte le camp d’entraînement de Winter Haven le 23 mars suite à une mésentente contractuelle. Immédiatement, le gérant Burt Shotton confie le poste à Gus qui pratique déjà à cette position depuis le début du camp. D’ailleurs, la veille Dugas a obtenu deux coups sûrs en quatre avec un circuit contre Newark. Mais, Dugas a-t-il vraiment ce qu’il faut pour jouer au premier but? Il lance de la gauche bien sûr, mais, il n’a jamais joué à cette position pas plus, évidemment, qu’à aucune autre position de l’avant-champ et il est le troisième plus petit joueur de l’équipe.
Même si les joueurs de baseball des années trente sont plus petits que ceux d’aujourd’hui, les 16 joueurs de premiers.but du baseball majeur cette année-là mesurent en moyenne 6 pieds. Dugas ne fait que 5’ 9’’. On ne peut pas s’attendre non plus à ce que Dugas puisse déloger Hurst lorsqu’il reviendra. Comme les joueurs n’ont pas de pouvoir de négociation à cette époque, Hurst n’aura d’autre choix que de rentrer au bercail, et ce, plus tôt que tard. C’est effectivement ce qui se passe dès le 5 avril soit avant le début de la saison. Mais, pendant ce temps, Dugas a perdu toute chance de se battre pour le poste de champ centre qui aurait été beaucoup plus à sa portée. Shotton laisse cependant planer la possibilité de commencer l’année avec Dugas au premier but puisque celui-ci a connu un excellent camp. Et c’est effectivement ce qu’il fait, peut-être parce que Hurst n’est pas en grande forme ayant manqué une bonne partie du camp, mais, probablement aussi pour le punir comme les équipes le faisaient à cette époque avec les récalcitrants. Quoi qu’il en soit Dugas entreprend les huit premiers matchs au 1er but à titre de quatrième frappeur. On lui fait par la suite sauter les trois matchs suivants au profit de Hurst et il revient au premier but comme 7e frappeur cette fois pour les trois derniers matchs du mois d’avril. Dugas qui, l’année précédente frappait bien lorsqu’il était utilisé régulièrement, termine le mois avec une moyenne de .150. En fait, sa meilleure période au bâton sera du 28 au 30 avril où il sera 3 en 11 avec 2 doubles, 2 points produits et 1 point compté. Ce regain de vie tenait-il à l’acclimatation à son nouveau travail ou était-ce qu’il recommençait à apprécier à jouer au baseball? On ne le saura jamais puisque le match suivant qu’il entreprend au 1er but n’a lieu que le 5 août, et ce sera son dernier dans les Majeures cette année-là. Entre la fin avril et cette date, il est employé plus d’une vingtaine de fois comme frappeur suppléant, mais sans obtenir vraiment de succès. Au total, il participe à 37 matchs et en 71 apparitions, il maintient une faible moyenne de .169 avec 3 doubles et 9 points produits. C’est donc le 5 août au soir que les Phillies annoncent que Dugas est cédé aux Sénateurs d’Albany de la ligue Internationale (AA) en échange de Jim McLeod un joueur de 3e but et du lanceur Frank Ragland.
Une fois à Albany et en jouant régulièrement au champ droit, Dugas retrouve son œil au bâton et obtient la meilleure moyenne au bâton de la ligue avec .379, mais ce, en 38 matchs seulement. Sa moyenne de puissance est de .538 avec 50 coups sûrs dont neuf doubles, trois triples et deux circuits. Ce sont là des chiffres qui attirent l’attention d’autres équipes dont les Royaux de Montréal de la même ligue qui tentent, semble-t-il, de l’obtenir. Mais, ce ne sera pas pour cette fois, d’autant plus que Dugas rêve toujours des Majeures et que les Sénateurs de Washington l’invitent à leur camp d’entraînement pour la saison à venir.
L’année 1934 sera une année charnière dans la vie et la carrière de Gus. Il fera un dernier séjour dans les Majeures, sera à nouveau cédé aux mineures, se mariera et retournera dans son pays natal. Au départ, comme chaque année, il semble se débrouiller très bien au camp d’entraînement des Sénateurs de Washington à Biloxi au Mississipi. Il obtient 4 coups sûrs, dont un circuit dans une victoire de 14 à 2 contre Pensacola. Il signe finalement un contrat avec les Sénateurs le 13 avril, mais il est bien clair cette fois qu’il ne sera qu’un joueur d’utilité avec les puissants Sénateurs qui ont remporté le championnat de l’Américaine l’année précédente sous la direction de Joe Cronin. Ces derniers peuvent compter sur John Stone dans la droite (.280 et 80 PP en 1933 à Détroit), Fred Schulte au centre (.295 et 87 PP l’année précédente) et surtout Heinie Manush un autre futur membre du Temple de la Renommée dans la gauche (.336 et 95 PP en 1933).
En fait 1934 est vraiment une année à oublier pour Dugas. Il ne commence aucun match, joue une fois brièvement au champ droit, est donc employé presque exclusivement comme frappeur suppléant et obtient un seul coup sûr (un double le 17 mai à Cleveland). Il termine l’année avec 19 présences au bâton, un seul coup sûr, un point produit et une moyenne au bâton de .053. Il dispute son dernier match dans les Majeures le 28 juin 1934 et c’est probablement cette journée-là ou le 1er juillet qu’il obtient de Babe Ruth (le meilleur joueur contre lequel il a joué, selon lui) une balle autographiée. Il se procure cette balle de pratique alors que Ruth utilise le passage obligatoire dans l’abri des Sénateurs pour se rendre dans la chambre des Yankees par une chaude journée d’été. Dugas saisit une balle et demande à Ruth de l’autographier. Celui-ci lui répond: «Sure kid». Cette balle demeurera dans la famille jusqu’à ce qu’elle soit détruite en mai 2007 dans l’incendie de la demeure du petit-fils de Lefty.
C’est encore une fois avec Albany dans la Ligue Internationale que Dugas se retrouve à compter de la mi-juillet. Pour une 2e année de suite, il connaît à Albany une fin de saison extraordinaire. En 57 matchs, il frappe 72 coups sûrs, dont 17 doubles, 5 triples et 5 circuits. Il obtient une moyenne de .371 la deuxième plus haute de la ligue internationale.
Le 22 octobre 1934, Dugas épouse à l’église St Mary’s à Baltic au Connecticut Doris Buteau qu’il connaît déjà depuis quelques années. Les nouveaux mariés aménagent au 46 SO A Street à Norwich dans une maison achetée par le père de Gus à la Ponomah Mills. La maison se trouve à quelques pas de celle des parents de Gus. Les nouveaux mariés y habiteront le reste de leur vie. Doris est infirmière à l’hôpital William W. Backus. Les grands-parents de Doris sont natifs de Sorel, mais son père est né à Baltic où il a épousé Hilda Freeman. Doris est née le 14 septembre 1910. Elle peut se débrouiller en français, mais elle a été élevée surtout en anglais contrairement à Augustin. De leur mariage seront issus 4 enfants. À la fin de 2010, Gus et Doris s’ils étaient vivants, auraient 6 petits-enfants, 13 arrière-petits-enfants et un arrière-arrière-petit-enfant. Un de ses arrière-petits-enfants est Andrew Carignan. Joueur de baseball, Andrew détient le record des sauvetages avec l’Université de la Caroline du Nord; il a été repêché en 2007 en 5e ronde par les Athlétiques d’Oakland. En 2010, il a lancé pour les Stockton Ports de la Ligue de la Californie.